
« Quand on sait choisir avec le discernement requis ce qu’il y a de meilleur dans le gout de la Musique de plusieurs nations : il en provient un gout mélé, qu’on pourroit fort bien, & sans passer les bornes de la modestie, appeler à présent : le gout Allemand ».
Ainsi le formulait J. J. Quantz dans la dernière partie de son Essai, publié à Berlin en 1752 : l’harmonieuse réunion des goûts italien et français a formé le goût allemand, qui réunit toutes les qualités des deux autres…
J. S. Bach fut certainement l’un des compositeurs allemands à réussir le mieux cette union de l’Italie et de la France. Loin de chercher une imitation de l’un ou l’autre de ces deux goûts nationaux il a voulu au contraire en mêler les éléments qui lui semblaient les plus expressifs et les plus marquants au sein de l’écriture musicale propre à chacune de ces traditions.
C’est ainsi qu’il utilisa les formes emblématiques de la musique instrumentale italienne : la Partita, à l’origine suite de variations, qui devient une suite de danses chez les allemands, la Fantaisie, dont l’origine remontait à la Renaissance italienne, aussi bien que la Sonate instrumentale, dont les Six Sonates et Partitas pour violon seul sont l’un des plus remarquables exemples en Allemagne.
Au cours de ce programme nous croiserons ainsi la courante et la gigue italiennes, la Partita et la Sonate, toujours mêlées à l’écriture contrapunctique chère au compositeur, ainsi que l’emploi de figures stylistiques typiques de l’Italie, comme l’écriture orchestrale inspirée des concerti grossi, l’imitation libre entre les voix, la tonalité de Fa Majeur, rarement utilisée par J.S. Bach pour le clavier mais prisée de Corelli, aussi bien que la flamboyante imagination du compositeur dans la Fantaisie. Détails parfois subtils, insérés dans l’écriture dense du compositeur, et que l’on ne remarque parfois plus, mais qui, pour les mélomanes de son époque, avaient bien la saveur d’un parfum d’Italie…
• Partita V en Sol Majeur BWV 829 (extraits) : Praeambulum, Corrente, Passepied, Gigue
• Sonate en ré mineur BWV 964, transcription anonyme de l’époque de la Sonate en la mineur pour violon seul (extraits) : Adagio, Fuga
• Suite Anglaise IV en Fa Majeur BWV 809 : Prélude, Allemande, Courante, Sarabande, Menuets I & II, Gigue
• Fantaisie Chromatique & Fugue en ré mineur BWV 903
Pascal Dubreuil, Clavecin
Après avoir travaillé le clavecin plusieurs années avec Yannick le Gaillard, Pascal Dubreuil obtient au CNSM de Paris ses premiers prix de clavecin et de basse continue. Il complète alors sa formation par de nombreux stages, avec Kenneth Gilbert notamment, et tout particulièrement auprès de Gustav Leonhardt (en France et en Allemagne). Il a également étudié la direction d’orchestre avec Nicolas Brochot.
Lauréat du Concours International de Bruges en 1997, il a développé depuis 1990 de nombreuses activités comme concertiste et pédagogue.
Comme claveciniste (mais aussi sur le clavicorde et le forte piano), il joue en France et en Europe (Allemagne, Pays-Bas, Espagne, Suisse, Italie, Belgique et Europe Centrale), en soliste et en musique de chambre, particulièrement avec Musica Aeterna, orchestre baroque de Bratislava, en tant que continuiste (clavecin et orgue) avec des ensembles vocaux ou en musique de chambre.
Il a enregistré pour Le Chant du Monde, K 617, Arion et il enregistre maintenant pour le label allemand Ramée (Antoine Dard, sonates pour basson et basse continue avec R. Rapoport, Clavier-Übung I de J. S. Bach, Clavier-Übung II, Suites anglaises, Variations Goldberg). Ses enregistrements pour Ramée ont été largement salués par la critique internationale. Son intégrale des six Partitas BWV 825-830 pour clavecin de J. S. Bach a notamment obtenu le prestigieux Prix Allemand de la Discographie.
Invité dans de nombreux festivals en France et en Europe il a été le premier claveciniste français à être invité au prestigieux Ruhr Klavier Festival en Allemagne.
En 2009, il a fondé son ensemble Il Nuovo Concerto.
Titulaire du CA de clavecin depuis 1986, il enseigne le clavecin, la basse continue et la musique de chambre au CRR de Rennes et au Pôle Aliénor de Poitiers, où il enseigne également la rhétorique musicale.
Ses travaux de recherche sur la rhétorique musicale, menés depuis de nombreuses années, l’ont conduit à publier, en collaboration avec Agathe Sueur, la première traduction française intégrale du traité Musica poetica (1606) de Joachim Burmeister, ainsi que d’importants extraits des deux autres traités de ce théoricien (Mardaga, 2007). Il a également enseigné cette matière pendant plusieurs années au CNSMD de Lyon, dans le cadre du cursus du Département de Musique Ancienne.
Reconnu comme un spécialiste de l’importance des notions et des concepts de la rhétorique et de l’éloquence dans la musique ancienne Pascal Dubreuil est amené à donner des séminaires et des Master-Class sur ce sujet dans diverses institutions de l’enseignement supérieur, en France comme en Europe.